WAR, Frontline #4 : Bryan Danielson (c) vs Shelton Benjamin (c)

Contexte : WARzone, deux heures avant le nouvel épisode de la Wisconsin Academy.

Bryan Danielson — Vous m'avez demandé, sergent ?



Sgt. Slaughter — Ah, Danielson. Comment te portes-tu ?

Bryan Danielson — Très bien, sergent. J'ai cette ceinture, je suis en super forme et je n'ai jamais été aussi motivé.

Sgt. Slaughter — Bien, très bien. Je sais que tu as un gros match qui t'attend et je ne voudrais pas gêner ta préparation alors si tu préfères retourner t'entrainer, je ne t'en voudrais pas.

Bryan Danielson — Je peux bien vous accorder quelques minutes sergent, ça ne me pose aucun problème.

Sgt. Slaughter — Tu en es sûr ? Shelton Benjamin est un gros morceau.

Bryan Danielson — Oui, j'en suis sûr.

Sgt. Slaughter — Je vais quand même essayer de faire cour. Voilà, en ce moment j'ai quelques soucis avec mes jeunes soldats de la Wisconsin Academy. Ils n'en font qu'à leur tête, sont complètement indisciplinés, complètement incompétents et j'ai même parfois envie de les frapper. Mais ce sont mes gars et je me dois des les former à devenir de grands guerriers. Seulement, je n'y arrive pas. Ils ne m'écoutent pas. Alors que je me suis dit que, peut-être, un grand champion pourrait accepter de leur montrer la voie.

Bryan Danielson — Moi ?

Sgt. Slaughter — J'ai bien demandé à Ken, mais il est très occupé en ce moment. Tout comme le sont Rocky, James et Ric. Shelton, quant à lui, est presque aussi puérile qu'eux. Alors oui, je te le demande à toi.

Bryan Danielson — Que dois-je faire, au juste ?

Sgt. Slaughter — Vas à leur rencontre et donnes leur quelques ficelles t'ayant permis d'être un vrai champion. Tu es libre de t'y prendre comme tu le souhaites, tu as toute ma confiance.

Bryan Danielson — C'est un honneur ! Où dois-je me rendre, et quand ?

Sgt. Slaughter — Ici et maintenant, ils t'attendent.

La sergent ouvre une porte, Danielson s'y engouffre sans attendre.

C'est dans un brouhaha assourdissant que le champion continental entre.

Bryan Danielson — Excusez-moi.

Cela ne semble pas intéresser les louveteaux de la Wisconsin Academy qui continuent leurs activités. Alberto Del Rio pli son écharpe sur un coin de table. Ron Killings perfectionne sa prestation scénique. Cody Rodes s'admire dans une glace alors qu'à ses côtés Harris semble vouloir lui parler. Lufisto profite du semi-coma éthylique du Sandman pour dessiner de fausses pilosités sur le visage de celui-ci alors que Punk semble dégouté par son l'état. CM Punk, justement, ne semble pas remarquer que Morgan vient de lui chourer sa ceinture. Bobby Lashley continues ses pompes avec un AJ Styles sur son dot très concentré sur les faits et gestes de Davey Richards. Rien ne semble être en mesure de pouvoir détourner leur attention.

Bryan Danielson — Excusez-moi.

Toujours aucune réaction. Danielson, résigné, décroche la ceinture de sa taille pour la mettre sur son épaule. Tous les yeux se tournent dans sa direction et le silence se fait.

Bryan Danielson — Merci.



Bryan Danielson — Savez-vous pourquoi vous êtes ici ?

The Miz — Pour nous entretenir avec Mister Anderson !

Davey Richards — ... avec The Rock !

Alberto Del Rio — ... avec Ric Flair !

The Sandman — *Burp !*

Matt Morgan — ... avec James Storm !

Cody Rhodes — ... avec Shelton Benjamin !

Bryan Danielson — Et bien non, vous ne verrez aucun de ceux-là aujourd'hui. La seule personne avec laquelle vous vous entretiendrez ce sera moi, Bryan Danielson, tout juste champion continental. Je sais que certains peuvent être déçus, mais je sais également que j'ai beaucoup à vous apporter. Si vous êtes réceptif, vous repartirez d'ici en sachant parfaitement comment préparer vos futurs matches et, par conséquent, comment les remporter.

Certains sont convaincus, d'autres non, mais tous écoutent attentivement Danielson.

Bryan Danielson — Pour commencer, comment bien préparer un match ?

Bobby Lashley — Faire de la muscu', à fond.

Bryan Danielson — S'entrainer, oui. Mais encore ?

Matt Morgan — Se renseigner sur son adversaire.

Bryan Danielson — Exactement. Avant toute autre chose il faut connaitre le mieux possible son adversaire, ses qualités, ses défauts. C'est connaitre son adversaire qui détermine la façon de s'entrainer. C'est connaitre son adversaire qui détermine la façon de catcher. C'est l'élément essentiel pour une bonne préparation. A valeur d'exemple, je me suis moi-même, cette semaine, beaucoup renseigné et j'ai beaucoup observé Shelton Benjamin. La première chose que j'ai remarqué chez lui, c'est son désintéressant. Durant toute la semaine qui vient de se dérouler il ne s'est jamais attardé sur mon cas. Il n'a regardé aucun de mes précédents matches, il n'a pas étudié la façon dont je me bats, il n'a pas pris soin de se renseigné sur moi. La seule chose qui l'a intéressé, c'est Mister Anderson. Il s'entraîne comme s'il était sur le point de l'affronter, il s'affiche partout où il le peut pour que celui-ci le remarque. Seulement, je ne suis pas Mister Anderson. Je n'ai pas sa notoriété, son palmarès, certes. Mais je suis surtout totalement diffèrent sur le ring. J'ai des qualités différentes des siennes, je catche différemment et c'est pour cela que je pourrai aisément surprendre le Gold Standard pour décrocher la victoire. Il s'attendra à des coups bien placés comme les faisaient Anderson, je le collerai au sol et le ferai abandonner.



CM Punk — C'est Shelton Benjamin, pas un vulgaire catcheur.

Bryan Danielson — Et quelle est la différence, huh ? Nous pratiquons tous la même discipline, Shelton Benjamin joue dans la même cour que nous. Si vous croyez justifier de le placer au-dessus des autres, c'est votre choix mais ce que je crois, c'est qu'il n'est en rien diffèrent d'un autre adversaire. Il a juste su se mettre en avant plus que d'autres en côtoyant la bonne personne, au bon moment. Mais le fait est que s'il n'avait pas eu la chance d'avoir cette relation avec Anderson, il serait peut-être avec nous aujourd'hui.

Davey Richards — S'il a eu Anderson comme mentor c'est parce qu'il a su se faire remarquer.

Bryan Danielson — Bien sûr, c'est ce qu'on a essayé de nous faire croire, et je dois avouer que le coup a été plutôt bien joué. Mais on sait tous comment ça se passe dans ces moments-là. Anderson était en fin de carrière et comme tous grand champion qui se respecte, il lui fallait un successeur. Alors il a tiré un nom au hasard et Shelton Benjamin a été choisi. Il a eu de la chance, ni plus, ni moins et si l'un d'entre vous avez eu cette chance il serait champion undisputed à l'heure actuelle.

Davey Richards — C'est vite dit.

Bryan Danielson — Peut-être, mais c'est la stricte vérité.

The Sandman — *Burp !*

Bryan Danielson — Est-ce que quelqu'un peut me le faire sortir d'ici ?

C'est Lufisto qui s'y colle et envoie le Sandman hors de la pièce à coups de chaise.

Bryan Danielson — Merci, Lufisto ?

Lufisto — Elle-même.

Bryan Danielson — Je crois savoir que tu as un match face au Sandman, justement. Comment t'es-tu préparé ?



Lufisto — A vrai dire, je ne me suis pas préparé. J'étais toute la semaine en tourner, j'ai enchaîné salles des fêtes sur salles des fêtes et j'me suis bien fait... douze dollars !

Bryan Danielson — Tu ne t'es pas posé une seule question vis à vie de ce match ?

Lufisto — Je me suis bien dit que le bonhomme n'est qu'un fanatique de l'ECW, incapable de passer à autre chose, mais je ne sais pas en quoi ça peut m'être utile.

Bryan Danielson — C'est très intéressant et de plus en plus rependu aujourd'hui. Ils sont nombreux à se renfermer sur leurs gloires passés, à considérer les choses acquises comme décisif, à croire qu'un match gagné il y a deux mois leur permettra de gagner le prochain. C'est une tare, une tare qui frappe même les meilleurs. Si tu le permets je vais te donner un exemple. Dernièrement j'ai eu affaire à ce genre de personne. Le champion olympique Kurt Angle, le champion universelle Claudio Castagnoli, le hall of famer Carlito, trois bonshommes renfermés sur leurs exploits passés, les yeux rivés sur le rétroviseur, incapable de regarder devant. Si je les ai battus tous les trois, c'est avant tous parce que j'ai su faire abstraction de tout ça. La WAR, voilà la seule chose ayant un réel intérêt aujourd'hui, ce qui s'est passé avant n'a aucune importance, ce qu'ils n'ont pas l'air de le comprendre. Mais bien qu'ils soient particulièrement remarquables dans le genre, ils sont tous les trois surpassés par un seul homme : Shelton Benjamin.

Lufisto — Quel rapport avec mon match ?

Bryan Danielson — Tu me disais, il y a quelques instants, avoir un adversaire n'existant qu'à travers son passé, c'est bien ça ?

Lufisto — Je n'ai pas dit ça comme ça, je n'aurai pas su dire ça comme ça, mais oui, c'est ça.

Bryan Danielson — Je suis exactement dans le même cas que toi et je vais t'expliquer pourquoi nous avons l'avantage sur eux. Premièrement, parce qu'à trop regarder en arrière, on fini indéniablement par se prendre un mur. Que ce soit sur le ring, ou hors du ring. Shelton Benjamin, par exemple, à complètement perdu le fil de son statu. A trop se retourner, à trop se voir beau, à trop se reposer sur ce qu'il a fait à la NoW, il en a oublié le principal. Là où on lui demande d'être la figure emblématique de cette fédération, on ne voit que le pale reflet de la toute puissance de Ken Anderson. Malgré son rebiffement, malgré sa tentative veine de s'éloigner du patron. Ce qu'il a connu à la NoW, la réussite, la gloire, il n'était pas prêt à l'encaisser et c'est pour cela qu'aujourd'hui il a du mal à passer à autre chose.

Ils semblent tous fascinés par Danielson, ce qui est compréhensible (bah oui, faut bien que j'donne du crédit à mon perso avant d'affronter l'un des meilleurs).

Bryan Danielson — Deuxièmement, parce qu'il s'agit-là d'un signe de faiblesse. Toute personne censée pourrait démontrer par a plus b que quelqu'un incapable de voir ce qui se passe devant lui est quelqu'un qui a peur. En l'occurrence ici, ils ont peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas être au niveau de ce qu'ils ont pu faire par le passé. Encore plus pour Shelton Benjamin qui semble on ne peu plus perdu dans son statut de leader et ce parce qu'on lui a tenu la main pendant de nombreux mois. Quand je dis on, c'est Ken Anderson, encore et toujours. Car oui, tout ce qui se passait dans la vie sportive de l'actuel champion incontesté lors des derniers jours de la NoW était totalement orchestré et géré par Anderson. De telle sorte qu'il ne lui arrive rien, de telle sorte qu'il arrive sain et sauf au bout, de telle sorte qu'il puisse être à la place lui étant revenu arbitrairement le jour J. Le fait est qu'il a été propulsé en haut de l'affiche par un autre, qu'il a été surprotégé et c'est ce qui rend compréhensible qu'aujourd'hui il ai peur. La peur ne laisse aucune chance. La peur détruit, même si ça ne se voit pas. Soit on l'affronte, soit on la subit. Lui, il subit.

Ouai.

Bryan Danielson — Troisièmement, parce que nous avons cette rage de vaincre qu'ils n'ont plus. C'est un fait, s'ils sont là à s'asseoir sur ce qu'ils ont fait c'est parce qu'il s'agissait de leur but, tout simplement. Qui dit but, dit objectif. Qui dit objectif, dit motivation et quand l'objectif est atteint, il n'y a plus de motivation. Shelton Benjamin avait pour but de montrer au monde qu'il était le meilleur, il avait pour objectif d'être au sommet, il avait pour motivation Anderson. Maintenant qu'il y est, il n'a plus de motivation. Il n'a plus cette volonté qui fait qu'un catcheur donne tout, jusqu'au bout. Il n'a plus ce supplément d'âme émanant d'un rêve à atteindre. Non, il n'a plus tout cela parce qu'il sait que même la pire des désillusions ne lui enlèvera jamais qu'un jour, sur le ring, devant le monde entier, il était le meilleur. Il est maintenant complètement hors jeu, incapable de se surpasser, incapable d'aller au bout de lui-même pour décrocher une victoire. Il est indiscutablement arrivé à bout, très tôt, trop tôt peut être. Pour lui il y a eu l'avant Never Backdown, il y aura l'après Never Backdown. Beaucoup plus fade, mais surtout plus bat au niveau de l'échelle mondiale du catch.

Après ce petit monologue, Danielson marque une pause. Personne ne semble savoir quoi dire. Ils étaient là pour obtenir des conseils, les voilà tous convaincu d’être capable de battre le champion Undisputed.

Bryan Danielson — Bien sûr de ton côté, il te faut prendre les facettes de ton propre adversaire, même si dans les grandes lignes, ils sont semblables. C’est d’ailleurs très désolant qu’une telle fédération ai actuellement un champion particulièrement banal.

Sourire ultra-bright de Danielson alors que Lufisto repart tranquillement à sa place.



Bryan Danielson — Heureusement que je suis là !

CM Punk — Et moi donc.

Bryan Danielson — Pardon ?

CM Punk — Moi aussi je suis champion et j’suis loin d’être banal.

Bryan Danielson — Malgré tout le respect que j'ai pour toi et tout le mérite que tu as, il s'agit là de quelque chose de bien plus important qu'être champion. Si je peux aujourd'hui me permettre de douter de Shelton Benjamin, de le provoquer, de me considérer comme meilleur que lui c'est parce que je suis probablement le seul à en être capable. Je ne mens pas, je ne me vante pas, je n'exagère pas. Je m'appuie simplement sur ce que j'ai fait à la WAR, rien d'autre. Mon parcours ici est bien plus prolifique et méritant que le sien. Alors qu'il est arrivé dans cette fédération avec le statut de superstar et un shot au titre suprême assuré, j'y suis arrivé en étant personne. Alors qu'il lui suffisait d'une joute verbale avec Castagnoli pour s'assurer un match de championnat, j'ai gagné le mien à la sueur de mon front. J'ai réalisé en un mois ce qu'il a huit mois à faire à la Nation of Wrestling. Oui, en un mois dans une fédération établie comme étant le top de ce business j'ai réussi à faire ce qu'il a fait en huit mois dans une fédération qui n'était à l'époque qu'à l'aube de ses grands jours. Je ne suis pas là en train de mettre tous les efforts qu'il a fait à néant, je veux juste que vous compreniez bien la difficulté qu'il a eu pour se hisser à ce niveau. Niveau que j'ai toujours eu en moi et qui n'attend qu'à exploser. Alors oui Punk, tu es un champion bien particulier, mais il te reste beaucoup de chemin avant d'arriver là où j'en suis aujourd'hui et où Shelton a mis tant de temps à arriver.

Matt Morgan — De toute manière le straight edge perdra son titre Wisconsin bientôt, car même s'il a de meilleures références, je suis convaincu de pouvoir le battre, rien qu'au vu de mes performances.

Bryan Danielson — Tu as tout à fait raison, moi-même je pense la même chose vis à vie de Benjamin. Les performances d'ailleurs, n'ont de valeurs que dans le contenu. Quelqu'un ayant remporté des centaines de matches face à de très mauvais adversaires est-il un grand champion ? Je ne crois pas. C'est d'ailleurs pour cela que j'émets de sérieux doutes sur le niveau de Benjamin aujourd'hui. Quand on résume son parcours ici, on se rend compte que ses victoires ont étaient acquises face à des adversaires loin d'être à la hauteur de l'événement. D'abord Beck, qui s'est retrouvé dans ce match parce qu'il était ami d'Anderson et parce qu'il avait eu l'incroyable chance de remporter un match dans le tourné d'adieu de celui-ci. Puis Kazarian, qui n'était là que pour donner un minimum de crédit aux actions de Flaire. Finalement MsChif, la solution de remplacement, catcheuse à temps partiel qui n'est plus resté régulièrement présente sur le ring depuis je ne sais quand. Certes elle n'est pas n'importe qui, mais elle n'était surtout pas en mesure d'être assez performante pour un tel match. De mon côté j'ai vaincu celui qui était champion universelle lors de son premier et dernier match puis Carlito, hall of famer qui malgré ses écarts actuelles, s'est avéré être un adversaire coriace. En somme, les grands matchs je connais, comment les gagner aussi. Shelton Benjamin sera probablement mon le match le plus difficile depuis le début de la WAR et j'en suis fier, car je vis pour ces matches là, je catche pour ces matches là.

Danielson récupère son titre et l’attache autour de sa taille avant de s’adresser une dernière fois à son public.

Bryan Danielson — Faites comme moi. Ne croyez seulement en ce que vous êtes capable de faire, ne vous voyez pas plus grand que vous n'êtes. Faites votre chemin comme vous le voulez. Ne vous focalisez pas sur un seul et unique but. Ne vous rabaissez pas devant soi-disant plus fort et peut-être qu'un jour, le monde vous appartiendra comme il m'appartiens aujourd'hui.

Sans un mot de plus, il part. Laissant les catcheurs de la Wisconsin Academy avec leurs doutes, leurs faiblesse, leurs peurs. Lui, il n’a rien de tout ça.